Les
peuples se soulèvent contre le capitalisme et l’appauvrissement
qu’il entraîne pour la majorité, pour la classe exploitée. Au
début du mois d’octobre, le peuple équatorien s’est massivement
soulevé pour rejeter les injonctions du FMI[1], tout comme l’a
fait le peuple haïtien appauvri par des siècles d’une «dette»
fallacieuse datant de l’époque coloniale[2], maintenant, c’est
le peuple chilien qui se soulève contre le pillage capitaliste,
contre l’exploitation et la précarisation des conditions de vie.
Il se soulève contre le pillage perpétré par les multinationales
minières, énergétiques, agro-industrielles (etc.), celles qui
dévastent des rivières, des forêts, des montagnes et des glaciers,
celles qui exterminent le peuple Mapuche, les autres peuples
indigènes et les petits paysans. Le peuple chilien se dresse contre la rapine
légalisée du capitalisme. Il se soulève contre les diktats du
Fonds Monétaire International et d’autres institutions
impérialistes, contre les dettes inutiles et infâmes contractées
par les gouvernements fantoches : des dettes et leurs intérêts
usuriers, que si le capitalisme continue à régner, la classe
exploiteuse fera payer aux peuples en hypothéquant la santé,
l’éducation, les ressources naturelles, etc.
Les «prêts» imposés par le FMI sont des dettes totalement inutiles (et plus encore pour des pays aussi riches en ressources que le Chili ou l’Équateur) : le problème est que les ressources sont pillées par le capitalisme transnational, la richesse est volée au lieu de servir au bien-être des communautés, la nature est anéantie sur l’autel de l’accumulation capitaliste d’une minorité, la souveraineté alimentaire n’existe pas lorsque la terre est entre les mains de la propriété privée. Le problème, c’est le système, et bien sûr, l’appauvrissement causé par le pillage capitaliste ne peut pas se résoudre par encore plus de pillage. Les «prêts» du FMI sont un mécanisme prédateur : les sommes seront consacrées au paiement des besoins en infrastructures des multinationales extractives (pour accroître le pillage qu’elles commettent déjà), au paiement des intérêts usuriers des dettes précédentes, aux poches de la bourgeoisie ; et c’est le peuple qui devra payer les emprunts et leurs intérêts, dans cet esclavage aberrant qui broie les vies et les écosystèmes.
La
hausse du prix des transports a été la goutte d’eau qui a fait
déborder le vase, dans un pays où la moitié de la population
survit avec un salaire minimum dérisoire, dont près du 15% doit
être consacré aux transports [3]. Le salaire n’est pas suffisant
pour payer le panier alimentaire de base, le loyer, etc. L’éducation et la santé sont privatisées au profit d’une poignée de milliardaires et la majorité en est exclue. En raison de ce qui précède, 80 % des plus de 18 ans sont endettés [4]. Les AFP (Administratrices de fonds de pension) sont un autre vol colossal contre le peuple chilien : ce sont des caisses privées imposées par l’État bourgeois. Les travailleurs doivent consacrer 10 % de leurs revenus à des comptes gérés par des sociétés privées. Les propriétaires de ces sociétés utilisent cet argent pour leurs affaires (mines, industrie, télécommunications, capitaux financiers, etc.) [5]. L’argent que les AFP collectent par les cotisations constitue plus du double de ce qu’elles paient en pensions ; il représente 80% du PIB du Chili : un festin pour les propriétaires des AFP, tandis que les retraités chiliens sont jetés dans la misère. Ce mécanisme de vol capitaliste a été instauré durant le processus de privatisation impulsé pendant la dictature de Pinochet. En 1981, José Piñera (frère de l’actuel président Piñera), ministre du Travail de l’époque, fut l’un des artisans de la mise en œuvre d’un paquet de mesures économiques importées depuis les Etats-Unis par les dénommés Chicago Boys, les maîtres du pillage capitaliste.
Le
peuple dit BASTA et sort dans les rues, dans toutes les villes et
régions du Chili. L’État bourgeois envoie ses forces
répressives : militaires, carabiniers, policiers déclenchent
une répression brutale. Les médias de la bourgeoisie étiquètent
les manifestants comme «vandales», «violents» et qualifient les
forces répressives comme «débordées» : ils appliquent le
même scénario de mensonges qu’ils ont appliqué en Équateur, et
qu’ils appliquent toujours contre tout peuple qui lutte pour la
justice sociale.
Le
gouvernement déclare l’état d’exception et met les chars de guerre dans
les rues. Mais la lutte du peuple, fatigué de tant de vol, de tant
d’injustice, de la quotidienne exploitation capitaliste, continue.
C’est la lutte des classes. La classe exploiteuse mène une guerre
continuelle contre la classe exploitée : une guerre
d’exploitation, de pillage, d’exclusion, de famine, de
manipulation, d’aliénation, de répression (si la classe exploitée
ne courbe pas docilement le dos). La classe exploitée pourra sortir
de la guerre continuelle exercée par la bourgeoisie, par la lutte.
Partout sur la planète, les peuples se soulèvent contre le
capitalisme et sa barbarie ; nous n’avons pas connaissance de la
plupart de ces luttes courageuses, parce que les médias sont la
propriété de la classe exploiteuse et sont destinés à maintenir
les peuples éloignés de la réalité, à alimenter la
désinformation, la xénophobie, le racisme, le machisme,
l’individualisme, à maintenir la classe exploitée divisée et
soumise. Mais la lutte continue, malgré les assauts des forces
répressives et des forces d’aliénation massive ; parce que
le désir de justice sociale et la dignité des peuples sont
irréductibles, ils se lèvent avec ténacité comme ces fleurs qui
brisent le bitume.
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Texte original écrit en espagnol, traduction pour ce texte par Rose Marie Lou (avec révision de traduction par C. Zamudio)
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Note
de bas de page:
1.- Équateur : du pillage colonial au FMI
2.- Le peuple haïtien lutta pour se libérer du colonialisme français, qui a pillé Haïti jusqu’à la moelle, déboisant la quasi-totalité du territoire et perpétrant le génocide, la déportation et l’esclavage des êtres humains. Haïti a été le premier pays à abolir l’esclavage, le 29 août 1793, en proclamant son indépendance. Mais la France a riposté en mobilisant toute sa puissance militaire, en assiégeant Haïti jusqu’à ce qu’elle accepte le paiement d’une «compensation» aux colons pour «les terres, les esclaves, les propriétés et les profits perdus». Ce sont les racines de la dette inique qui, aujourd’hui encore, tue le peuple haïtien. La prétendue «dette» s’élevait à 150 millions de francs d’or : une somme colossale à payer par les victimes de la colonisation aux bourreaux.
En savoir plus: http://www.cadtm.org/Haiti-de- la-colonisation-a-l
3.- Chili. Face à la lutte pour le tarif social des transports publics, Piñera impose l’état d’urgence
4.- Rapport sur la dette personnelle, Université Saint-Sébastien.
5.- Pourquoi les Chiliens rejettent-ils leur système de retraite AFP ? - “AFP pour qui. ” : Les grands groupes économiques qui bénéficient des investissements des AFP au Chili